Attachement et Syndrome de Stress Post-Traumatique

Un traumatisme complexe est ce qui se produit lorsqu’une personne subit de multiples incidents de cruauté et d’abus dans le contexte d’une relation de pouvoir inégale. C’est le plus souvent le cas chez les personnes qui ont grandi avec des parents violents ou négligents, mais aussi chez les victimes d’enlèvement, les prisonniers de guerre et les personnes ayant des relations sexuelles ou « romantiques » abusives. Le résultat de ce traumatisme complexe est le SSPT-C (SSPT complexe), qui a des effets similaires au stress post-traumatique (SSPT) subi par les personnes qui ont été victimes d’accidents de voiture ou d’événements traumatiques similaires mais qui entraîne des troubles plus profonds de la personnalité. De nombreuses personnes chez qui on a diagnostiqué des troubles bipolaires et autres troubles de la personnalité sont, en fait, des survivants d’un traumatisme complexe. Pour ce faire, il faut examiner l’histoire personnelle et la vie de la personne plutôt que de se limiter à analyser ses symptômes immédiats.

Une autre façon de voir les traumatismes complexes et le syndrome de stress post-traumatique est le concept de traumatisme d’attachement. L’attachement – les liens qui existent entre un être humain et un autre – est un concept qui peut paraître plutôt vague ou abstrait. Cependant, comme tous les états émotionnels, tels que le bonheur, la peur ou la colère, il est issu de notre biochimie et est essentiel à l’épanouissement humain.

Bien que le niveau d’intelligence distingue les humains des animaux, c’est seulement en collaborant que nous avons réussi à survivre et à nous développer. Un être humain ne peut tout simplement pas abattre un mammouth laineux à lui seul. Les êtres humains ont évolué pour coopérer et travailler ensemble en groupes. Une de ces caractéristiques est notre capacité unique d’acquisition du langage. Pour une véritable coopération sociale, cependant, la simple communication d’informations ne suffit pas. Dans notre monde moderne, on est capable de s’occuper de nombreuses tâches quotidiennes (faire les courses, par exemple) sans aucun lien émotionnel, mais les groupes cohésifs dans lesquels les humains ont évolué exigeaient un niveau de connexion beaucoup plus profond.

Aujourd’hui encore, on peut constater qu’un bureau où il n’y a pas de camaraderie entre employés ne fonctionne pas bien, quel que soit le niveau de rémunération. La vie de famille, les groupes d’amitié et les relations amoureuses sont, évidemment, très difficiles à préserver sans attachement. Du fait de notre évolution, tous, ou presque tous les êtres humains ressentent un profond besoin de se sentir liés aux autres, que cela soit une question de survie ou de prospérité matérielle. Les personnes qui ne nouent pas de liens sont souvent en proie à des sentiments de dépression et de tristesse, peu importe leur succès dans d’autres domaines de la vie.

L’attachement, cependant, est difficile. Établir une relation avec un autre être humain implique une communication verbale et non verbale, ainsi qu’une danse complexe avec les comportements appropriés. Exprimez trop peu d’empathie dans une relation et vous pourriez être considéré comme froid ou distant. Exprimez-en trop ou trop tôt et vous pourriez être considéré comme envahissant. Les individus aux troubles du spectre autistique, communément appelés Asperger, (…) ne possèdent généralement pas l’instinct qui leur permet d’établir de bonnes relations, ce qui rend leur vie difficile à comprendre et à appréhender pour le reste de la population.

Cependant, comme tous les traits humains, la faculté de former des liens d’attachement n’est pas purement innée ; c’est un comportement qui est appris. Et comme pour la plupart des apprentissages humains, l’attachement s’apprend par la pratique. Dès la naissance, les bébés découvrent l’attachement. C’est là, et pas seulement la nécessité de pourvoir matériellement aux besoins de l’enfant, le fondement de la famille, une composante universelle de la société humaine. Même les expériences sociales utopiques visant à remplacer la famille ont dû s’appuyer sur des structures qui reflétaient essentiellement le schéma mère-père, et ce avec des résultats mitigés.

Il est donc logique que lorsque la relation entre les parents, ou un tuteur, et l’enfant est sérieusement perturbée par la violence ou la négligence, cela a des répercussions beaucoup plus vastes que la seule relation parent-enfant. Les survivants de traumatismes complexes se développent généralement avec des lacunes dans leur capacité à créer des liens d’attachement avec les autres. Cela ne veut pas dire que leur désir d’attachement en soit diminué, loin s’en faut. Le désir insatisfait d’établir des liens et le sentiment envahissant de solitude chez les survivants de traumatismes complexes sont des facteurs importants qui contribuent aux symptômes qu’ils éprouvent, notamment la dépression, l’incapacité de réguler leurs émotions et leur comportement à risque ou autodestructeur.

Dans le traitement des personnes atteintes du SSPT-C , le renforcement de la capacité à éprouver de l’attachement et à se sentir en sécurité, en confiance, appréciées et aimées est une grande priorité. C’est aussi un processus extrêmement difficile. Comme je l’ai mentionné dans de précédents articles, il est préférable de conceptualiser le SSPT comme un processus d’apprentissage dans des circonstances très désastreuses plutôt que comme un processus d’endommagement. Comme tous les enfants, les personnes qui grandissent dans un environnement de violence permanente naissent avec un potentiel qu’elles développent à leur manière dans des circonstances adverses. En résumé, les survivants de traumatismes complexes dans l’enfance apprennent à vivre dans un monde à l’envers parce que c’est le seul monde qu’ils aient jamais connu. La thérapie pour les personnes atteintes de SSPT-C est une démarche sensible, qui consiste à revoir le processus d’apprentissage initial et à en amorcer un nouveau qui leur permettra de grandir et de se développer de façon plus saine et plus satisfaisante.

Source : Dr Fabiana Franco / Good Therapy

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