sexualité et agressions sexuelles dans l’enfance

Comment je reconstruis mon rapport à la sexualité après avoir survécu aux agressions sexuelles dans l’enfance

Les fondements de ma sexualité ont été forgés dans le cauchemar. J’ai grandi, mais chaque jour je me bats pour me rappeler que je suis digne d’amour – Hannah Shewan Stevens.

Pendant trois années de mon enfance, j’ai été conditionnée et agressée sexuellement. Enfant, on m’a enlevé mon autonomie corporelle et on a tracé la voie de ma sexualité avant même mon consentement.

Les sévices sexuels subis dans l’enfance laissent leurs empreintes et les effets ne disparaissent pas à l’âge adulte – longtemps après la fin des sévices, l’impact des actes de mon agresseur a hanté chacun de mes pas.

Ma sexualité et mon estime personnelle ont été irrévocablement altérées par la violence, et j’ai passé des années à y travailler dessus. Mon agresseur m’a appris à être passive en tout, et cette attitude sexuelle a été difficile à rectifier. La manipulation subie m’a également incitée à croire que j’avais un certain contrôle sur la violence, et je m’en suis rendue coupable lorsque cela a brusquement cessé. Ces années de conditionnement m’ont laissée vulnérable à la manipulation et à l’approbation des hommes pour me sentir reconnue.

Mais j’ai maintenant renversé la situation et trouvé le chemin de la guérison : le plaisir de se faire plaisir.

Adolescente, je n’étais pas du tout préparée pour naviguer dans le monde de l’intimité sexuelle. Je connaissais la nature biologique des actes sexuels, mais je ne savais pas que les sentiments pouvaient entrer en jeu, ni que le respect mutuel était une condition essentielle. Et, le plus préjudiciable était je n’avais aucune idée de ce qu’était le consentement. Tout ce qu’on m’avait préparé à faire, c’était de me soumettre aux désirs des hommes.

Je me suis perdue dans un tourbillon de rapports sexuels dangereux. Je sacrifiais mon confort au plaisir des autres, j’acceptais d’être séduite par des hommes plus âgés, je tombais dans un schéma d’objectivation sexuelle.

La seule explication que je peux donner à cela est le surnom que j’ai donné au masque que je portais durant l’acte –  » en mode prostituée  » – surnom que j’ai trouvé après avoir vu Pretty Woman pour la première fois, en écoutant Julia Roberts expliquer comment elle permutait d’état psychologique pour son travail. Cette scène a résonné en moi plus que toute autre comédie romantique pour adolescents.

Le cercle vicieux du chaos sexuel a régi ma vie pendant des années et, dans ma première relation, je me suis battue pour lier émotion et intimité. Je pouvais sentir le plaisir de l’intimité sexuelle mais, émotionnellement, j’étais engourdie.

Grâce à une thérapie intensive de  »l’enfant intérieur », j’ai commencé à relier intimité et sentiment amoureux et finalement j’ai pu  »ressentir » quelque chose quand je faisais l’amour. Mais ce n’était que le début de mon cheminement. J’ai dû apprendre à travailler avec mon cerveau traumatisé, plutôt que contre lui, et j’ai fait de la plongée psychique en grande profondeur pour affronter le détachement émotionnel qui m’avait empêché de vivre mes émotions pendant mes relations sexuelles. Je continue à y travailler tous les jours.

En plus de la honte ressentie à cause des sévices subis, j’avais également profondément honte de ma libido effrénée, une conséquence bien connue des violences sexuelles dans l’enfance. J’avais peur de ma propre sexualité.

J’avais l’impression d’avoir perdu le contrôle de mon propre corps. Je me sentais avant tout objet, et après femme. Pour reconquérir mon corps, il a fallu que j’apprenne à me respecter et que j’arrête de me considérer comme l’objet des autres. L’autosatisfaction ne pouvait qu’être la solution.

Après des années à donner la priorité au plaisir de mon partenaire, je savais que je devais apprendre ce que le plaisir signifiait vraiment pour moi. J’ai passé beaucoup de temps avec moi-même pour explorer et déterminer ce qui me plaisait. J’ai adopté la masturbation et, peu à peu, j’ai appris ce qui me convenait.

Ce procédé m’a aidé à comprendre mon corps et à le revendiquer comme étant le mien. En développant ma sexualité, j’ai finalement appris à avoir des relations sexuelles en toute liberté et dans un respect total de moi-même. Ceci dit, à ce jour, je dois encore me surveiller attentivement pendant les rapports sexuels au cas où je commencerais à me dissocier.

Bien que cette vigilance constante puisse ne pas paraître libératrice pour la plupart, je ne me suis jamais sentie aussi épanouie dans ma vie sexuelle. Je peux maintenant profiter du rapport intense entre sexualité et sentiment, et je comprends enfin pourquoi l’amour et la relation sexuelle sont censés s’entrelacer. C’est un acte magnifique et puissant et je me sens privilégiée de pouvoir y participer de manière saine. Je me bats dur tous les jours pour cela et je ne le tiendrai jamais pour acquis.

Le fait de reconnaître ma sexualité m’a également redonné une plus grande confiance en moi dans tous les aspects de ma vie. Compte tenu de la bataille que je mène dans ma tête tous les jours, je sais que je peux affronter tous les défis que la vie décide de me lancer.

Ensuite, j’ai rencontré quelqu’un qui a transformé ma perception du sujet. Il m’a doucement emmenée sur un chemin que je n’étais pas consciente d’avoir à parcourir. Avec lui, j’ai accepté mon corps et, enfin, j’ai pu découvrir ce que cela faisait de se sentir désirée. C’était le premier partenaire à vraiment vouloir partager mon plaisir, au lieu de m’utiliser pour le sien. Avec lui à mes côtés, j’ai maîtrisé le pouvoir de ma propre sexualité et, avec le temps, cela m’a aidé à guérir de nombreuses blessures.

Je vis avec un SSPT complexe et j’ai des cauchemars si intenses que je procrastine sur mon sommeil pour les éviter. Mais j’avance – la guérison d’un traumatisme sexuel, quel qu’il soit, n’est pas un processus facile. Le traumatisme ne disparaît pas du jour au lendemain. Alors, même si je dois entraîner mon cerveau tous les jours, mon plaisir personnel reste ma clé de survie.

Chaque fois que j’ai l’impression de m’éloigner de la réalité, j’utilise mon plaisir personnel pour m’enraciner et reconnecter mon esprit avec mon corps. Et, les jours particulièrement sombres, je me mets devant un miroir et me rappelle que je suis plus forte que les sévices. Je suis digne d’amour. Je suis une femme puissante, dotée de capacités et d’autonomie. Je suis une survivante sexuelle et je n’ai pas honte.

Je n’aurais plus jamais honte.

Traduit par courtoisie de Huffpost

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